Genre, colonialisme et éducation au Japon
Avec :
Sophie Rainaut (doctorante, ENS, IAO/IFRAE)
« Éducation coloniale et masculinité(s) : les politiques éducatives de l’Empire japonais, entre assimilationnisme et gradualisme (1918-1937) »
Dans le Japon d’avant-guerre, le système des manuels d’État imposa à partir de 1903 l’usage de manuels identiques, édités par le ministère de l’Éducation, dans l’ensemble des écoles primaires métropolitaines. Ces manuels, en particulier ceux de morale et de lecture, comportaient des leçons touchant à la différenciation de genre, mais étaient également parcourus par des normes genrées disséminées à travers les personnages. Ils nous permettent ainsi d’analyser la formation d’une identité masculine chez les jeunes garçons en milieu scolaire. Mais que devient cette analyse une fois confrontée au système éducatif colonial mis en place à Taiwan et en Corée ? Les manuels édités par les gouvernements généraux coloniaux se démarquaient des manuels métropolitains dans leur difficile recherche d’équilibre entre gradualisme et assimilationnisme. Retrouve-t-on dans les mêmes proportions les modèles de masculinité métropolitains, en particulier celui du soldat ?
Yuki Ueno (doctorante, université Toulouse-Jean Jaurès, IFRAE)
« La domination masculine dans l’enseignement secondaire au Japon : quelques résultats d’un travail de terrain »
L’enseignement secondaire (chûtô kyôiku 中等教育) constitue au Japon le cadre dans lequel la séparation des sexes imposée dans les écoles primaires entre filles et garçons se perpétue et s’amplifie inconsciemment à travers les comportements des élèves eux-mêmes. L’objectif de mon travail consiste à analyser deux types de curriculum : le curriculum explicite, qui est organisé sous forme de programmes, y compris pour l’enseignement des matières et l’« instruction de la vie » (seikatsu shidô 生活指導), et le curriculum latent, qui n’est pas intentionnel de la part de l’enseignant, mais qui a implicitement une incidence sur le développement des élèves en tant qu’êtres humains. Dans cette intervention, je présenterai les résultats obtenus lors d’observations effectuées sur le terrain en 2024, déterminants pour comprendre la « théorie des caractéristiques du genre » (seibetsu tokusei ron 性別特性論), qui est la pensée fondamentale sur laquelle s’appuie la séparation des filles et des garçons dans l’institution scolaire au Japon.
Participation en distanciel possible ; contacter les organisateurs : Christian Galan, Marine Déplechin